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Les années folles en quête d’un féminin singulier

Choisir un livre et partir à la rencontre d'un bel inconnu

Choisir un livre et partir à la rencontre d’un bel inconnu

Une silhouette vous accroche et vous éprouvez le désir d’en connaître plus.
Son nom résonne avec votre état d’âme du moment, il n’y a :  » Rien où poser sa tête « .
C’est un vieil ami qui patiente en haut d’une étagère et va sortir de son isolement silencieux.
Vous allez à la rencontre de :  » Mrs Dalloway « .
Il s’est paré de ses plus beaux atours, vous trépignez d’impatience à l’idée de vous y frotter et de découvrir  » Les mille talents d’Eurídice Gusmão « .
Un bolide arrive et se mêle aux trois premiers dans  » Une allure folle « .
Quatre romans rencontrés dans un mouchoir de poche du temps, quatre quêtes de femmes dans
les années folles.

Cent ans déjà

C’est le début des années folles, celles qui succèdent à une guerre meurtrière et stupide comme elles le sont toutes.
La croissance économique s’affole, les femmes obtiennent le droit de vote aux États-Unis*.
Le cinéma devient parlant.
La paix est revenue, l’enfer de la guerre patiente pour lever à nouveau son front de taureau.
Quatre histoires de femmes entrées en guerre pour affirmer leur identité.
Quatre chemins éclairés de cet amour vieux comme le monde, en lutte pour lui imposer une vision nouvelle au féminin.

Découvrez  » Les mille talents d’Eurídice Gusmão  » de Martha Batalha

Rio de Janeiro, Brésil

Les années vingt, dans un quartier populaire.
Partez à la rencontre de métiers insolites au cœur d’un quartier typique de la ville :
un brasseur de bière, un libraire, un pianiste sans instrument.

L’histoire

Au siècle dernier, les filles brésiliennes, comme celles d’ailleurs n’ont pas le choix, elles doivent :
– Se marier et répondre aux attentes familiales.
– Rester vieille fille, subir les moqueries et les regards de pitié.
– Ou pire encore devenir une fille perdue, mise à l’index de la société.
Pour échapper à ces destins sordides, il leur faut souvent renoncer à exprimer leurs talents pour une vie
terne et étouffante, comme celle de leurs aïeules.

Les personnages

Deux sœurs soudées depuis l’enfance choisissent des chemins de vie opposés.
L’une, Guida, tente d’échapper à sa condition en suivant un homme aux riches espérances.
Elle s’enfuit du cocon familial. Abandonnée, elle élève seule son fils.
Cette attitude scandaleuse lui vaut d’être reniée par ses parents.
L’autre, Eurídice, reste et trouve sa part de liberté dans l’exercice de ses multiples talents.
Elle déborde d’énergie. Elle se rit des obstacles rencontrés sur sa route et aborde la musique, la couture, la peinture ou la cuisine de haut vol avec un égal bonheur.
Son mari, Antenor, employé de banque, aspire à une vie tranquille, conforme à la bienséance.
S’il aime sa femme et le bien-être qu’elle apporte au foyer, il apprécie beaucoup moins cette facette créatrice qui met du désordre dans le ménage et bouscule les idées reçues.
Les deux sœurs Gusmão sont des rebelles, des parias qui refusent l’ordre établi.
Elles tournent le dos à la vie terne et prévisible promises aux femmes de la famille.
Incontrôlables, elles mènent leur destin tambour battant en dépit d’un environnement rude et d’un
entourage hostile.
Mille talents pour des personnages attachants qui suscitent admiration et tendresse.

L’auteure, Martha Batalha

Née en 1973 à Recife, elle grandit à Rio de Janeiro (Brésil).
Elle y fonde sa première maison d’édition.
Puis elle part pour les États-Unis où elle travaille en tant qu’éditrice.
En Californie, elle vit en famille et se consacre à l’écriture
Écrivaine et journaliste, c’est son premier roman.
 » Les mille talents d’Eurídice Gusmão  » reçoit le prix des lecteurs en 2018.
Il a été adapté pour le cinéma en 2019 sous le titre :  » La vie invisible d’Eurídice Gusmão « .
Un roman à mettre entre toutes les mains de toutes les femmes et de tous les hommes intelligents et
sensibles.

Extraits

Découvrir son corps de femme
 » Eurídice apprit que certains regards étaient différents des autres, et qu’il existait des regards capables de
changer les gens non seulement de l’intérieur, mais aussi de l’extérieur… la jeune fille était en proie à
l’inconfort, prenant conscience de son nouveau corps, révélé par un simple regard. « 
La vie à deux vue par Antenor
 » Il voulait être libre de lécher le sol pour en prouver la propreté, il voulait pour sa sieste du mardi des fruits
frais achetés au marché, et l’assurance de ronfler toutes les nuits avec quelqu’un dans le même lit. « 
Être mère, le choix de Guida
 » Si jadis elle désirait plus que tout perdre son enfant, à présent elle était prête à tout perdre, sauf son
enfant. Guida blottit le bébé entre ses seins et elle se sentit en paix. Quel bonheur que tu sois là, Francisco.
Plus jamais elle ne se sentirait seule. « 

Partez à la recherche de Françoise Frenkel sans  » Rien où poser sa tête « .
À Berlin en 1920 puis dans le sud de la France et la Haute Savoie
Un périple qui mène sur la ligne de démarcation, une vue de l’intérieur d’un découpage abstrait et absurde .

L’histoire, l’art de la fuite

Une enfant passionnée de livres cultive un rêve : créer sa propre librairie.
Elle le réalise à Berlin, la première librairie française ouvre ses portes.
Après des débuts difficiles, elle rencontre un succès honorable.
Les années passent, arrivent l’orage de feu et d’acier.
1939, Françoise a cinquante ans. Elle doit fuir la capitale allemande.
Sa librairie diffuse la pensée française considérée comme subversive et dangereuse pour le régime en place.
La voici fugitive, errante, en danger dans un monde en train de s’effondrer.
Ballottée d’un lieu à l’autre, dénoncée, secourue, incarcérée, libérée puis reprise.
Un témoignage précieux, un récit émouvant entre pudeur et terreur.

Les personnages

Françoise raconte son histoire, un roman à la première personne.
À travers son regard, le lecteur vit ces années tragiques d’occupation.
Le quotidien des français, leur courage, leurs lâchetés.
Vous faites la connaissance des Marius, un couple au dévouement indéfectible, de Marion vénale et traîtresse et de tous ces personnages qui traversent la vie de Françoise.
En zone occupée, les démarches pour sortir de cette nasse sont kafkaiennes.
Les files d’attente se multiplient pour quelques miettes de nourriture.
Corruptions et dénonciations sont d’actualité.

Contrôle zone occupée, zone libre

L’auteure, Françoise Frenkel

Françoise est l’auteure d’un seul livre. Sa vie reste un mystère.
Née en Pologne en 1889 elle décède à Nice en 1975.
Entre temps, elle fonde la première librairie française à Berlin.
On lui connait un mari fantôme dont elle porte le nom.
Elle disparaît à la frontière genevoise après avoir confié son manuscrit à un éditeur.
Nulle trace de cette femme hormis un dossier d’indemnisation à son nom daté de 1958.

Extraits

Le style simple et clair installe une intimité entre l’auteure et le lecteur.
Avant-propos
 » Il est du devoir des survivants de rendre témoignage afin que les morts ne soient pas oubliés, ni méconnus les obscurs dévouements…
Je dédie ce livre aux HOMMES DE BONNE VOLONTÉ qui, généreusement, avec une vaillance infatigable, ont opposé la volonté à la violence et ont résisté jusqu’au bout.
Des adieux déchirants au rêve de sa vie
 » Alors je me levai pour faire mes adieux…
Je passais de rayon en rayon, caressant tendrement le dos des livres… et subitement je perçus une mélodie infiniment délicate… elle venait des étagères, des vitrines, de partout où les livres menaient leur vie mystérieuse. « 
La confiance de la partie de la population menacée reste ancrée malgré la menace omniprésente.
Un raisonnement qui mène à l’abattoir :
 » Nous sommes en France, dans un pays qui nous a accordé l’hospitalité et la protection. Nous avons envers lui un devoir de loyauté et nous devons répondre à ses exigences. « 
Quand ça se dégrade, on emmène même les enfants, vision d’apocalypse
 » C’est l’hallali, les mères se coupent les veines, d’autres se jettent sous les autocars au moment où ils
démarrent. « 

Adoptez  » une allure folle  » avec Isabelle Spaak

Bruxelles entre deux guerres

Un livre contrasté : si la première moitié nous fait languir, la seconde nous mène par le bout du cœur à toute vapeur.

L’histoire

Isabelle part à la recherche d’une grand-mère fantasque et d’avant-garde comme le fait Anaïs Barbeau-
Lavalette dans  » La femme qui fuit « *.
Toutes deux ont ce même besoin de découvrir leurs racines.
Femmes du temps passé qui éclairent les femmes du temps présent.
Pour Isabelle c’est une douloureuse histoire familiale qui se déroule de 1920 à 1980.

Les personnages

Mathilde, une femme qui ensorcelle les hommes et collectionne les amants.
Armando, riche agent maritime italien, tombe sous les charmes de Mathilde.
Il l’installe dans un hôtel particulier bruxellois.
Une vie dorée qui sied peu à Mathilde qui n’a qu’un souhait : faire reconnaître sa fille Annie née de cette
union hors mariage.
Elle mène sa vie tambour battant dans une situation hors normes.
Sa petite fille, Isabelle, découvre ses mystères à travers lettres et photos.
Elle les dévoile avec tendresse et étonnement. Mathilde nous mène de surprises en catastrophes dans un
roman tout en finesse.

L’auteure, Isabelle Spaak

Née en 1960, fille de diplomate, Isabelle part s’installer aux États-Unis à l’âge de quinze ans.
Elle est romancière et journaliste.
Ça se passe dans la vraie vie.
La mère d’Isabelle assassine son mari puis se suicide.
Isabelle est orpheline, elle a vingt ans.
Vingt ans plus tard, elle part à la recherche de ces deux femmes à la réputation sulfureuse et découvre que ce sont des héroïnes. Elle raconte dans l’excellente émission  » La grande librairie  » :
 » Isabelle Spaak raconte l’histoire de sa mère et de sa grand-mère à la grande librairie « 

« >Extraits

 » Éviter de mettre des mots sur une histoire pour prétendre qu’elle n’a pas existé n’efface rien. « 
En parlant de Mathilde
 » Ma grand-mère n’a jamais été en retard d’une escapade, y compris dans des lieux complètement passés de mode aujourd’hui. « 
En parlant d’Annie, assassin et Juste* devant l’Éternel :
 » C’est moi qui dis merci à votre mère. Si elle n’avait pas été là je n’y serais plus…
Comment était-elle quand vous l’avez connue ?
Pensez donc, j’avais dix ans ! Je ne me souviens d’absolument rien de votre maman !

Prenez une grande inspiration, abordez  » Mrs Dalloway  » de Virginia Woolf

Londres, les années folles

J’ai tourné longtemps autour du livre avant de me lancer.
J’ai oublié la préface pour entrer dans le vif du sujet. Un peu d’entêtement et le charme a opéré.
J’ai retrouvé le tandem formé par le couple Dalloway rencontré dans  » La traversée des apparences « *.
La lenteur du récit en longues phrases enveloppe la lectrice comme une capeline de soie.
Les émotions en teintes pastel conquièrent peu à peu son âme.

L’histoire

L’unique journée d’une femme du monde, au regard acéré sur la société londonienne des années vingt. Les femmes en sont les ornements. Elles se doivent d’être délicates, raffinées, sensibles, cultivées, avec un brin d’intelligence. Si elles expriment leurs désirs, elles sont qualifiées d’hystériques. Amour et mort entremêlées pour cette femme déchirée entre son mari et son amour de jeunesse qu’elle aime encore.

Les pensées suicidaires de l’auteure se révèlent dans les pensées de Clarissa et Septimus.

Les personnages

Mrs Dalloway, est une véritable aristocrate anglaise.
Clarissa est snob, on pourrait même dire, elle est coincée.
Ce n’est qu’une apparence. La cinquantaine, elle est consciente de ses limites, limites imposées par la
société.
Fine observatrice, elle dissèque les personnages qui gravitent autour d’elle avec une compréhension
attendrie.
Au fil des pages, elle déroule sa vie émaillée de considérations bien senties, se révèle philosophe, découvre son espace de liberté.
Septimus, un vétéran de la première guerre mondiale déroule les pensées d’un esprit perturbé.
Il est peut-être le seul à conserver une part de simple humanité.
Aucun ennui ressenti au cours de ce long monologue, si la lectrice accepte de se laisser aller comme ces
barques qui glissent le long de la Tamise.

Virginia Woolf à Monk’s house

L’auteure, Virginia Woolf

Icône de la littérature anglaise du 20ème siècle.
En 1882 à Londres, naît Adeline, Virginia, Alexandra Stephen.
Elle épouse Léonard Woolf dont elle prend le nom.
En 1917, le couple fonde leur propre maison d’édition  » Hogarth Press  » qui publie tous ses romans.
Son roman phare,  » Mrs Dalloway  » paraît en 1925 et rencontre le succès littéraire espéré.
En femme libre, Virginia vit sa vie comme un roman.
Elle défend la cause féministe et se bat pour que le rôle des femmes soit repensé.
Elle milite pour le droit de vote et soutient le mouvement des suffragettes.
Elle ne supporte plus sa déchéance psychique.
La peur de devenir folle qui ne la quitte pas la mène au suicide.
Un jour de mars 1941, elle emplit ses poches de cailloux et sombre dans la rivière Ouse* proche de son
domicile.

Extraits

De l’humour
 » Elle avait le don de vous mettre les nerfs en pelote, oui, de vous les rouler en tire-bouchon. « 
Des sensations féminines dans la tête masculine de Septimus
 » …les feuilles étaient vivantes; les arbres étaient vivants. Et les feuilles, reliées par des millions de fibres à
son corps sur le banc, l’éventaient de haut en bas; quand la branche s’étirait, il en faisait autant. »
Vivre l’instant présent
 » Malgré tout, qu’à un jour succède un autre jour… Qu’on se réveille le matin; qu’on voit le ciel; qu’on se
promène dans le parc… Après cela, la mort était inconcevable… l’idée que cela doive finir; et personne au
monde ne saurait comme elle avait aimé tout cela… »

Les livres sont des refuges, des trésors, nos maisons de papier

Les livres sont des trésors, des refuges, nos maisons de papier.
Ouvrir un livre c’est la boîte de chocolats de Forrest*.
La surprise patiente à l’intérieur.
Vous goûtez, la bouchée vous déplaît, vous la reposer sans l’avoir terminée.
Elle vous ravit, vous fermez les yeux et vous vous laissez emporter.
Laquelle allez-vous déguster ?

* François Bhavsar : Peintre, né en 1967. Son atelier est à Fontainebleau. Il expose en France et à l’étranger.
* 1920, droit de vote des femmes aux États-Unis
Remarque : Le premier pays à l’avoir accordé est la Nouvelle-Zélande en 1893.
En France, il faudra attendre 1944 ! En Angleterre, les femmes de plus de 30 ans peuvent voter à partir
de 1918. Il faudra attendre 1928 pour que l’âge soit ramené à 21 ans.
* La femme qui fuit de Anaïs Barbeau-Lavalette : Un roman commenté dans l’article du blog acoupdelles
 » Quatre bouquins de femmes par acoupdelles « 
* Juste : Nom donné à celle ou celui qui a mis sa vie en péril pour sauver la vie de juifs.
* La traversée des apparences, le premier roman de Virginia Woolf paru en 1915.
* La rivière Ouse : Cours d’eau du Yorkshire, au bord duquel se trouvait la maison de Virginia Woolf.
* Forrest Gump : Film de Robert Zemeckis, sorti en 1994. À voir ou revoir, superbe;

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Clem

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